La France qualifie de “risquée” la tentative de l’Allemagne de modifier la réglementation européenne sur les moteurs de voiture
mars 16, 2023La tentative d’affaiblir la réglementation automobile de l’Union européenne divise les grandes puissances de l’Union
Lundi, le ministre de l’économie Bruno Le Maire a déclaré que la France était prête à “se battre” contre l’Allemagne afin de préserver la législation européenne sur les transports verts, qui interdit essentiellement la vente de voitures et de camionnettes équipées de moteurs à combustion à partir de 2035.
Les remarques qu’il a faites ont mis Paris et Berlin sur une trajectoire de collision concernant la législation proposée, qui est un élément crucial du programme environnemental de l’UE qui exige des constructeurs automobiles qu’ils commercialisent exclusivement des véhicules à zéro émission à partir de 2035.
M. Le Maire a déclaré à France Info qu’ils étaient prêts à se battre pour cette législation, car retarder sa mise en œuvre serait une erreur d’un point de vue environnemental et économique.
Le gouvernement allemand, en collaboration avec des alliés tels que l’Italie, la Pologne, la Bulgarie et la République tchèque, tente de faire obstruction à la législation à la dernière minute, à moins qu’il ne reçoive des amendements au texte qui créeraient une exception pour les voitures utilisant des e-carburants, qui sont un substitut synthétique et un peu plus écologique aux carburants fossiles qui peuvent être utilisés dans les moteurs à combustion traditionnels.
Lundi après-midi, les ministres d’Allemagne, d’Italie, de la République tchèque et de Pologne se sont réunis à Strasbourg pour discuter de leur stratégie de préservation du moteur à combustion.
Cependant, Paris n’est pas favorable à la modification d’une mesure qui a été établie après deux années difficiles de négociations, qui a été conclue pendant la présidence française du Conseil européen l’année dernière et qui n’a besoin que d’une confirmation ministérielle pour devenir une loi.
M. Le Maire a critiqué les tentatives d’obstruction de la proposition en affirmant qu’elle est économiquement illogique, dangereuse d’un point de vue industriel, qu’elle ne sert pas les intérêts du pays, qu’elle n’est pas avantageuse pour les producteurs nationaux et, surtout, qu’elle est préjudiciable à la planète.
L’opposition de l’Allemagne est menée par le Parti démocrate libre, qui est un petit membre de la coalition au pouvoir et qui supervise le ministère des transports. Le FDP pense avoir découvert un sujet politique convaincant en capitalisant sur les inquiétudes concernant la transformation difficile qui accompagnera le passage aux véhicules électriques. Cette transition sera catastrophique pour de nombreuses entreprises spécialisées dans les pièces de moteurs à combustion, mais qui n’ont pas de rôle à jouer dans l’industrie des véhicules électriques.
En outre, on craint que le passage aux véhicules électriques ne rende l’Europe vulnérable aux constructeurs automobiles chinois, qui sont en avance dans le domaine de la technologie des batteries et de la fabrication de véhicules électriques, et qui ont des vues sur le marché rentable de l’UE.
Des discussions sont en cours entre le gouvernement allemand et la Commission européenne concernant une éventuelle solution. L’une des options envisagées est la création par la Commission d’une déclaration juridique traçant la voie à suivre pour l’utilisation des e-carburants dans les véhicules vendus après 2035. Toutefois, cette proposition a suscité de nombreuses inquiétudes, car elle risque d’affaiblir les objectifs climatiques de l’Union européenne.
Selon un porte-parole du ministère allemand des transports, Bruxelles n’a pas encore présenté de “proposition constructive”. Le FDP détient la clé d’une résolution, puisqu’il doit déterminer si le langage suggéré par la Commission répond à ses exigences.
Si cette initiative échoue, alors Berlin et ses partisans demanderaient essentiellement une réouverture des négociations sur la législation 2035. M. Le Maire a explicité la position de la France sur cette question et le Parlement européen a également déclaré qu’il ne s’engagerait pas dans de nouvelles discussions.
Fracture continentale
L’impasse aligne la France sur les autres nations qui soutiennent l’objectif 2035 en matière de voitures propres, notamment l’Espagne, la Belgique, la Suède, le Danemark, l’Irlande et les Pays-Bas. Ce différend met à mal l’affirmation de l’Europe selon laquelle elle est à l’avant-garde de la réduction des émissions de gaz à effet de serre, et risque de s’étendre à des discussions plus globales sur l’équilibre des pouvoirs au sein de la politique continentale.
Selon un diplomate d’un pays favorable à l’interdiction des moteurs,
“pour les Français, cette circonstance est aussi une opportunité. Plus ils peuvent promouvoir l’idée que l’Allemagne fait cavalier seul, plus ils renforcent l’idée que les Allemands sont un partenaire indigne de confiance en Europe”.
M. Le Maire plaide pour une transition rapide des constructeurs automobiles européens vers les véhicules électriques, et il a soutenu les initiatives françaises de subventions gouvernementales substantielles pour les VE, ainsi que les tentatives de l’UE d’investir des milliards d’euros dans l’établissement d’un secteur national de cellules de batteries.
M. Le Maire a affirmé qu’il était contradictoire de reconnaître l’urgence climatique, qui est évidente dans de nombreuses villes et métropoles polluées, et de revenir ensuite sur l’objectif de transition vers les véhicules électriques.